
Voici La force du nombre, titre d’autant approprié pour cette toile de 30 po X 53 po que chaque petite masse, à l’origine, fut numérotée. Il y en a 2665 au total. Le résultat, je trouve, est au rendez-vous, mais il m’a fallu patienter quelques années entre la première et la dernière exécutions. Je suis donc passée devant ma toile, suspendue au mur de l’entrée, un nombre incalculable de fois, en ressentant immanquablement une déception allant croissant. Bientôt je ne ressentirai plus rien par rapport à cette toile, ni déception navrante ni satisfaction tardive, car elle est sur le point de se rendre habiter chez mon frère Swiff.
Ce matin, j’ai couvert d’une couche de couleur supplémentaire les graffitis d’une autre toile de grand format, 40 po X 40 po celle-là. Elle risque, la pauvre, de connaître le même triste sort que La force du nombre, c’est-à-dire qu’elle va habiter l’entrée principale de la maison le temps que je trouve la manière de lui procurer son plein potentiel.
Mon tempérament boulimique, ici, me crée des ennuis. Un autre projet, en effet, s’est profilé, et je ne m’y consacre pas sous prétexte de finir d’abord les graffitis. Je n’ai pas la discipline de me consacrer quelques heures à une toile, et quelques heures à une autre, de manière organisée, structurée, planifiée.
Ce nouveau projet a pris naissance lors de l’atelier que j’ai organisé à la maison, la semaine dernière, qui a réuni Bibi, une amie et moi. J’avais sélectionné quatre photos de toiles que nous allions tenter de copier : un portrait de Henri Matisse, un pot de fleurs tiré d’un livre qui enseigne comment peindre à l’aquarelle, un paysage d’Antoine Dumas, et un autre paysage, plus tourmenté, de David Hockney. J’aurais choisi le portrait, quant à moi, mais Bibi ne l’aimait pas. Elle hésitait entre le pot de fleurs et le paysage de Dumas. L’amie nous disant beaucoup aimer le Dumas, nous y sommes allées pour Dumas.
Sa toile s’intitule Les illusions. Elle reproduit le Rocher Percé de manière réaliste. Il se découpe sur un ciel tourmenté dont les mouvements des nuages sont tout sauf réalistes. En ouvrant le livre au hasard, une fois notre atelier terminé –bien entendu–, je suis tombée sur une page qui explicite l’oeuvre, en ce sens que le ciel n’est pas tourmenté pour rien : les nuages évoquent des bateaux, plus précisément une caravelle, un sous-marin, un paquebot ! L’auteur du livre, Roland Bourneuf, qui m’a enseigné à l’Université Laval dans les années quatre-vingt, interprète ainsi la portée de ce tableau : « … [il] allie la représentation réaliste du Rocher Percé au symbole des nuages-navires avec, pour cargaison, nos rêves collectifs. »
Morales de l’histoire : 1. j’ai bien fait d’acheter ce livre sur le peintre Antoine Dumas dans un bazar de sous-sol d’église ! 2. Nous allons, Bibi, l’amie et moi, refaire la copie de la toile en tentant de faire ressortir les bâtiments maritimes dans le ciel !
Cette toile est magnifique! Je la verrais bien sur le plancher d’une salle de bain chic et bien éclairée, l’image rendue par des milliers de petits morceaux de céramique de toutes ces couleurs.
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C’est une idée audacieuse ! Je n’y aurais jamais pensé moi-même. Merci !
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I was so excited to see the title of this painting, « The Force of Numbers, » because it perfectly describes the feel of the work – each little mass at the beginning was numbered. There are 2665 of them in total. The result was worth the wait, but it took me a few years to get there. I’m so glad I had the opportunity to walk past the work, hanging on the wall outside my door, countless times. Soon, I won’t feel anything at all about it, either joyful or disappointing, because it’s already been done.
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