
Voici l’avant. Nous étions je crois l’été dernier. Je montrais à un ami quelques photos de mes toiles enregistrées sur mon téléphone. Il peint aussi, alors nous partagions quelques-unes de nos nouveautés.
– C’est une représentation de la fée clochettes, avais-je précisé. La vois-tu ? Tu sais, un des personnages des aventures de Peter Pan ?
– Hum… je ne vois pas trop.
– Elle est ici, en noir, avais-je montré du doigt. Elle a des bras et des jambes surdimensionnées.
– Peut-être… En tout cas je te suggère de ne rien ajouter. C’est déjà chargé avec ces papiers imprimés.
– Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter, avais-je répliqué, déplorant intérieurement que la toile ne me plaise pas plus que ça.
Dans ma vaste entreprise récente d’amélioration de mes peintures et de mes textes, j’ai retiré du mur cette version avant et l’ai déposée sur ma table, dans mon bureau. Je me suis tenue devant, plusieurs fois, toujours incapable de trouver une manière de la rendre plus vivante.

Hier soir mercredi, l’idée est venue caresser mon esprit : laisser des coeurs sortir de la bouche de mon personnage, là où s’entrouvrent les lèvres. D’une chose à l’autre, j’ai ajouté un cou, et un chapeau duquel j’ai laissé pendre une fleur. Je n’ai pas du tout réfléchi quant aux couleurs, j’ai pris quelques restants qui étaient sur le point de sécher même s’ils étaient couverts d’un film plastique.
Ce n’est pas la première fois que je verse des restants de couleurs sur une toile en faisant en sorte qu’il se crée une forme circulaire de laquelle je deviens plus ou moins prisonnière. Que faire avec une forme circulaire refermée sur elle-même ? Un arrière-plan qui imite une tapisserie, un quelconque imprimé ?
J’aime que la tête soit dorénavant assortie d’un cou, et j’aime que le chapeau, sa fleur et les coeurs viennent égayer l’ensemble. Je pourrais toujours ajouter d’autres coeurs, mais cela ne me semble pas nécessaire. Je ne sais pas si je désire intituler ma toile Valentin, ou Le langage du coeur, ou La fée clochettes qui est toujours là, intacte.
Je constate, une fois de plus, que la touche Longpré réside dans des apports enfantins, naïfs, colorés.