Sauf que je ne suis pas dans le bureau de Mélina ! Je suis chez moi, toujours malade. Et j’ai tout l’après-midi, si je le désire, pour poursuivre la psychanalyse de mon rêve en rondelles.
Mais c’est trop compliqué, jouer le personnage de l’analyste et de l’analysée. C’est trop compliqué pour le lecteur, je veux dire, parce qu’en ce qui me concerne, j’écris ces échanges imaginaires avec une grande facilité. Après je les relis, attentivement, et je me demande si le lecteur va comprendre. Et je conclus que s’il est bien concentré, s’il ne lit pas trop vite et si le sujet l’intéresse au-dessus de tout, il va comprendre !
C’est de cette manière d’ailleurs que j’ai écrit ma thèse de doctorat. J’ai inventé une interview entre un journaliste fictif féru de littérature et moi, doctorante. À cette époque, j’étais convaincue que je deviendrais écrivaine, alors cette interview était ni plus ni moins une pratique pour les fois véritables où j’allais devoir répondre à des questions semblables à la télévision devant public. J’avais construit l’interview sur un ton joyeux, je naviguais entre certains concepts empruntés à la phénoménologie et d’autres à la psychanalyse, je faisais des liens entre les nouveaux romanciers et le roman chevaleresque Don Quichotte de la Manche… Ma directrice de thèse, plutôt intimidée par le volet création de ma thèse, ne savait pas trop comment m’encadrer, elle me laissait aller.
En sortant de son bureau, lors de notre première rencontre, je n’ai pas trop su sur quel pied danser. Nous avions convenu de nous rencontrer trois fois pendant l’année de ma rédaction de mémoire, et une quatrième fois pour discuter du mémoire tel qu’il se donnerait à lire au terme de l’année. Après, j’aurais l’été pour retravailler les parties faibles. Et à l’automne, je demanderais une date de soutenance. La première rencontre avec ma directrice avait eu lieu à l’automne, et nous devions nous revoir en janvier. Je n’ai pas trop su sur quel pied danser, donc, à cette première rencontre, et je me suis dit à bien y penser que tout l’interview était à recommencer. J’y abordais les thèmes sérieux de la littérature d’une manière trop légère, trop joyeuse, trop badine. J’ai récrit mes quelque premier cinquante pages d’une manière plus adaptée à la réflexion universitaire, me semblait-il, mais ma directrice, lisant le paquet de feuilles que je lui avais fait parvenir par la poste, m’avait téléphoné pour crier à la catastrophe. Mon texte, dépressif à souhait, était bon pour la poubelle.
– Vous avez certainement des copies de sécurité, m’avait-elle demandé, du texte de votre première version ?
– Sûrement, avais-je répondu en ne sachant pas si j’en avais.
D’une chose à l’autre, j’avais tout recommencé : le premier cinquante pages pour en faire une version ni trop badine ni dépressive, le deuxième cinquante pages que j’avais entretemps écrit dans l’esprit dépressif du premier texte deuxième version. Et pour être certaine de ne pas me tromper, j’avais écrit le dernier cinquante pages en deux versions, mais je n’ai pas poursuivi la deuxième version jusqu’au bout par manque de temps.
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Badouziennes
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Qui est Badouz ?
Une autrice illustrement inconnue !
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Soignez-vous bien au chaud, chère Lynda, de préférence au coin du feu, en agréable compagnie.
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Nous avons deux foyers, mais ne faisons jamais de feu ! Cependant la maison est chauffée par une immense fournaise qui dégage un ronron permanent. J’adore !
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Photo magnifique d’un très beau décor!
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C’est fait avec amour ! Merci à toi.
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